Translate

jeudi 3 mai 2012

Les descendants de Caïn (Gn 4, 17-24)



Après le récit du premier fratricide, le texte biblique décrit le sort de Caïn et de sa descendance. Il s'agit d'un texte qui s'articule principalement autour d'une généalogie.


Caïn s'éprend d'une femme (dont le nom reste inconnu) qui donne naissance à Hénok. Caïn devient constructeur de ville et donne à la ville le nom de son fils (Hénok). Il est étrange d'apprendre que Caïn, condamné plus tôt au nomadisme, se retrouve fondateur d'une ville. Cette incohérence dans le texte permet de penser que cette généalogie n'est rattachée qu'artificiellement à Caïn. Hénok prend femme et engendre à son tour Irad. Irad engendre Mehuyaël, et Mehuyaël engendre Metushaël, et Metushaël engendre Lamek. Ce dernier prend deux femmes (Ada et Çilla). Ada donne naissance à Yabal: il s'agit de l'ancêtre de tous ceux qui vivent sous la tente et ont des troupeaux. Ada donne naissance également Yubal: il est l'ancêtre de tous ceux qui jouent de la lyre et du chalumeau. Çilla donne naissance à Tubal-Caïn qui devient l'ancêtre de tous les forgerons. Elle enfante également Naama mais aucune profession ne s'y rattache.

Si l'on accorde une attention précise à la phonétique et à la valeur sémantique de certains mots, on découvre que les trois castes décrites (les éleveurs de bétail, les musiciens, et les forgerons) sont rattachées à trois ancêtres dont les noms sont assonants et rappellent les métiers de leurs descendants.  Yabal (ybl "conduire), Yubal (yôbel "trompette"), Tubal (nom d'un peuple du Nord, au pays des métaux). S'ajoute à cette liste le nom de Caïn qui signifie "forgeron" en d'autres langues sémitiques. Quant à Naama, qui signifie "la Douce", "la Gracieuse", il pourrait s'agir d'un éponyme désignant une fille de joie (raison pour laquelle le texte demeure muet sur sa profession).


Après la généalogie, un chant (versets 23-24), introduit par Lamek à l'attention de ses femmes, proclamé pour sa propre gloire,  souligne la violence croissante des descendants de Caïn.Tous ces développements associés à la vie citadine prennent leur origine dans la racine maudite de Caïn. Il s'agit d'une première allusion à l'évolution de l'humanité qui bientôt conduira à l'histoire de la tour de Babel.


Le temps des patriarches (Gn 4, 25- 6,4)

Adam et Ève ont un troisième enfant qu'ils prénomment Seth. Ce prénom , en hébreu Shet, s'explique par "shat" (il a accordé). Effectivement, Dieu manifeste sa bonté en permettant ce nouveau départ. Une nouvelle descendance prend forme après l'échec de la première (Caïn et Abel). Seth a pour fils Énosh. On recommence dès lors à invoquer le nom de Yahvé. Un nouveau germe de vie prend place.

Les Patriarches d'avant le déluge (Gn 5,1-32)

Ces versets contiennent l'ensemble de la descendance d'Adam. Cette lignée est celle transmise suite à la naissance du troisième enfant, Seth. On apprend, et cela peut surprendre, que les patriarches vivent jusqu'à un âge très avancé.  Ainsi Seth aurait vu le jour alors qu'Adam avait cent trente ans. Adam aurait vécu durant une période de huit cents ans après la naissance de ce troisième fils. Il donna naissance encore à des fils et à des filles, et mourut à l'âge de neuf cent trente ans. Les premiers patriarches atteignirent presque tous l'âge de neuf cents ans. Le grand-père de Noé,  Mathusalem, détient le record avec neuf cent soixante-neuf années. Ce serait d'ailleurs, selon l'histoire biblique, le déluge qui serait venu mettre fin à sa vie. De Noé à Abraham, l'âge moyen de longévité se situe entre deux cents à six cents ans. Ceux qui suivirent vécurent seulement de cent à deux cents ans.


Il va sans dire qu'il ne faut pas attribuer une valeur vraie à ces âges, ni recevoir le texte comme une chronologie au sens strict. Cette généalogie de tradition sacerdotale est construite sur un schéma répétitif. On constate que la longévité extraordinaire des patriarches diminue avec le temps. Cet indice est révélateur: il souligne le progrès du mal dans le monde. En effet, toute longue vie est une bénédiction de Dieu, et tout homme enclin au mal s'en trouve par conséquent affecté. Cette affirmation n'est pas sans lien avec la figure de Jésus-Christ qui offrira, plus tard, la vie éternelle à tous ceux qui croiront en Lui.

Fils de Dieu et filles des hommes (Gn 6, 1-4)

Ces versets de tradition Yahviste suscitent de nombreuses questions. On suppose que l'auteur reprend ici une tradition populaire à caractère mythologique. Qui sont ces "Fils de Dieu"? Et comment expliquer leur relation avec les filles des hommes et les "Nephilim" ? Ces questions demeurent sans réponses.  Le judaïsme postérieur et les premiers écrivains écclésiastiques ont vu dans ces "Fils de Dieu" des anges coupables. À partir du IVe siècle, en raison d'une interprétation plus spirituelle des anges, les Pères de l'Église ont interprété les "Fils de Dieu" comme la descendance de Seth, et les "filles des hommes" comme la descendance de Caïn.

Il ressort de cette histoire que Yahvé prend ses distances de l'humanité déterminée à peupler le paradis de son propre chef.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire